Petite histoire des PROJECTIONS en COULEURS
Posté par Patrice Guerin le 6 mai 2013
“La couleur c’est la vie !”, même le regretté Claude DUNETON, auteur d’une anthologie d’expressions populaires, ne donne pas l’origine de cette formule qui sonne comme une réclame pour des pots de peinture. Elle convient parfaitement à la photographie, autre “reflet” de la vie.
LA PHOTOGRAPHIE
Depuis l’invention de la photographie dans la première moitié du XIXe siècle, par Nicéphore NIEPCE (1765-1833) et Louis DAGUERRE (1787-1851) en France ainsi que par Henry Fox TALBOT (1800-1877) en Grande-Bretagne, le génie humain n’a eu de cesse d’en améliorer le réalisme par la couleur, le relief et autres procédés pour la rendre “plus vrai que nature”.
Voir : http://www.niepce-daguerre.com/ _ Histoire et description des procédés du Daguerréotype et du Diorama par Daguerre
Photographie couleur de la ville d’Agen réalisée par DUCOS DU HAURON en 1872
En France, le principe de la photographique en couleur est décrit dans un brevet déposé le 23 novembre 1868 par Louis DUCOS DU HAURON (1837-1920). Il est considéré comme étant l’inventeur du procédé trichrome, même si Charles CROS (1842-1888) dépose quelques mois avant lui, en 1867, un pli cacheté à l’Académie des Sciences. Le procédé de DUCOS DU HAURON consiste « 1° A créer trois négatifs avec l’interposition d’un écran orangé pour l’un, d’un écran vert pour le deuxième, d’un écran violet pour le troisième ; 2° à tirer et superposer sur un même fond blanc trois positifs monochromes de ces trois négatifs, savoir : un positif bleu d’après le négatif de l’écran orangé, un positif rouge d’après le négatif de l’écran vert, un positif jaune d’après l’écran violet ». Cette communication fit peu de bruit à l’époque et fut même rejetée par certains spécialistes de la photographie à cause des « difficultés pratiques du procédé ».
Collection musée Nicéphore Niépce – Chalon sur Saône
En 1874, il fait breveter le “Mélanochromoscope”, un appareil équipé d’un seul objectif et de miroirs semi-transparents, permettant d’exposer simultanément à travers trois filtres, bleu, vert et rouge, trois plaques noires & blanches différentes, de format 35x35mm. Pour visionner ces photographies en couleur on se sert du même appareil qui permet de superposer visuellement trois positifs obtenus à partir de ces négatifs et mis en couleurs dans leur teinte respective par les verres colorés de l’appareil.
DUCOS DU HAURON travailla aussi sur l’impression des couleurs, les images stéréoscopiques et même les anaglyphes. Malheureusement il ne rencontra jamais le succès et mourut dans la misère.
LA COULEUR
L’œil humain comporte trois types de récepteurs (cônes) correspondant à trois longueurs d’ondes différentes donnant chacune la sensation de rouge, de vert et de bleu.
L’usage de la couleur dans la représentation picturale est bien antérieure à la photographie, comme en témoigne toutes les œuvres laissées par nos ancêtres depuis la préhistoire. Cependant la couleur restera longtemps quelque chose d’assez mystérieux : « Les objets envoient des gerbes de lumière contenant des faisceaux diversement colorés… Il est à remarquer que, si l’on pouvait grouper en chimie des sels qui se fixent en précipités colorés de nuances correspondantes à celles des radiations émergentes, on obtiendrait la photographie polychrome ». La Science Populaire 1881.
Frontispice du livre de KIRCHER “Ars Magna Lucis et Umbrae” – 1646
En 1646, Athanasius KIRCHER (Voir PORTRAITS) publie un traité sur la lumière en relation dialectique avec l’obscurité “Ars magna Lucis et Umbrae” qui lui vaut d’avoir longtemps été considéré comme le premier à décrire une lanterne magique. Dans la préface, il décrit la lumière comme «l’authentique produit (rejeton) de la lumière et de l’ombre». La couleur est une «lumière ombrée» et «tout ce qui est visible dans le monde ne l’est que par une lumière ombreuse ou par une ombre lumineuse ».
Voir : Athanasius KIRCHER et la lanterne magique
Portrait montage de MAXWELL, Source cliquer ici
Le premier à étudier scientifique la couleur est le physicien anglais James Clerk MAXWELL (1831-1879), considéré comme l’un des scientifiques les plus importants du XIXe siècle. EINSTEIN lui-même décrivit ses travaux comme les « plus profonds et fructueux que la physique ait connu depuis le temps de NEWTON ». De 1855 à 1872, il publie une série de recherches concernant la perception des couleurs, pour lesquelles il reçoit la médaille Rumford en 1860.
En 1861, lors de la séance générale de la “Royal Institution”, il expose sa théorie sur les couleurs fondamentales en projetant sur un écran trois faisceaux lumineux triangulaires provenant d’une lanterne à trois objectifs (triunial) devant lesquels sont disposées des cuves de verre contenant la première une solution rouge (sulfocyanate ferrique), la seconde une solution verte (chlorure cuivrique) et la troisième une solution bleue (sel de cuivre ammoniacal). Les trois triangles se recouvrant partiellement « on voit les couleurs pures apparaître dans les angles, tandis que le centre contient les divers mélanges de couleurs ».
S’appuyant sur les travaux de MAXWELL, le photographe anglais Thomas SUTTON (1819-1875) prend en 1861 trois photographies d’un ruban de tartan sous trois filtres de couleurs différentes puis projette devant un public étonné la première photographie couleur trichrome.
Ces deux axiomes étant posés, voyons, dans l’article suivant, comment ils peuvent se rejoindre dans un seul et même procédé, La projection de photographies en couleurs, procédé TRICHROME.
Super, j’adore votre blog, je n’étais pas au courant pour Talbot. Au musée des art décoratifs à Paris, ils ont énormément d’appareils ancien, le savez vous ?